Pour la plupart des pêcheurs, la saison de pêche en eau libre est terminée. Pour une minorité d’entre nous, c’est le sprint final en quête d’une grosse Momma Musky, ce fameux Musky Mammoth dont on rêve tous de prendre avant la prise des glaces. Mais avant de mettre un point final à cette saison, je voulais vous partager ce texte. Ces quelques mots, qui j’espère, mettront un peu de lumière sur une situation qui m’a préoccupé tout au long de ma saison de pêche.
Être pêcheur de maskinongé vient avec une certaine responsabilité : celle d’avoir de bonnes pratiques de remise à l’eau. Si on a cette qualité de pêche au Québec, c’est en très grande partie grâce au « catch and release », et à ceux qui le font de la meilleure façon possible. Si ce n’était de cela, ça ferait longtemps qu’il n’y aurait plus de maskinongé dans nos plans d’eau.
Vous avez sûrement remarqué, il y a beaucoup plus de pêcheurs de maskinongé qu’il y en avait il y a de ça quelques années. Cette augmentation de pression de pêche sur le maskinongé n’est pas sans conséquence. Il y a forcément plus de pêcheurs en apprentissage qui ne font pas forcément les choses de la bonne façon et qui, sans le vouloir, tuent des musky par manque d’éducation. Il y a une période cet été où je voyais des musky morts à toutes mes sorties de pêche et non, ce n’était pas dû à la température trop chaude de l’eau. Malheureusement, certaines personnes le pêchent avec un équipement inadéquat : pas le bon « gear », pas les bons outils pour le décrocher, net pas assez gros, etc.
Il y a aussi les autres, ceux qui, pour avoir leur petit moment de gloire sur les réseaux sociaux, oublient à quel point ce poisson est fragile. Ces gens n’ont aucun problème à prolonger le temps d’exposition du poisson en dehors de l’eau de façon déraisonnable pour faire leur « photo shooting » question d’épater la galerie une fois la journée terminé. Il n’hésiteront pas à se passer le musky, à prendre plusieurs minutes avec le poisson en dehors de l’eau pour avoir tous les angles possibles du poisson, de faire un vidéo super « hot » de tout ça, etc. La survie du poisson devient secondaire, ce qui est important c’est d’avoir cette fameuse photo ou vidéo qui va satisfaire leur l’égo à coup de « like ».
Vous trouvez que j’ai la critique facile, mais dites-vous bien que je me garde une petite gêne. Des pêcheurs de musky qui publient des photos et des vidéos, qui se disent guides ou pros et qui ne respectent pas les règles de bases d’une bonne remise à l’eau, j’en ai vu en masse. C’est justement pour essayer de démystifier tout ça que je me permets de faire ce texte. C’est certain que pour le nouveau venu dans cette pêche, lui, quand il voit ces « pros » faire des remises à l’eau, il suit leurs exemples, c’est normal ce sont des « pros ». Par contre le nouveau venu ne sait pas lui que ce fameux pro, il y a 3 ans n’avait qu’un musky à son actif et que ce gars manque d’expérience, ou qu’il n’est juste pas au courant des meilleures façons de faire. Tout est en constante évolution et les bonnes pratiques de remise le sont aussi. En tant que pêcheurs, nous sommes tous passés par là et avons tous fait des erreurs. L’idée, c’est de s’améliorer.
Étant donné que je ne suis pas qu’un chiâleux dans la vie et que j’aime apporter des solutions, je me suis dit qu’un petit « update » au niveau des bonnes pratiques de remise à l’eau était à faire. Étant donné que je ne suis que Patrick Therrien, un simple guide de pêche, je me suis dit que mon discours aurait un peu plus d’impact si je demandais à deux sommités de donner leurs points de vue. Le premier se nomme Sean Landsman, biologiste qui a effectué plusieurs études sur le maskinongé. Le deuxième à qui j’ai demandé son point de vue n’est nul autre que Mike Lazarus, légende vivante de la pêche au maskinongé.
Je les ai entre-autre questionné sur ce fameux mouvement de va et vient qu’on voit si souvent lors des remises à l’eau, et que je considère personnellement comme inutile, voir nuisible pour le maskinongé. Voici donc ce que Sean avait à dire:
“In terms of moving Muskies back and forth, I don’t have a video explaining why not to do that but to me it’s less about the force on their gills (although that is definitely a consideration) or the reverse water current going over their gills, but more about just reducing overall handling. Why keep touching them? As long as they’re upright, they should be fine. Any additional touching we do only adds to their stress, so when I advocate for people to just put them back and not swish them back and forth it’s more about reducing our overall handling time.”
Pour ce qui est du témoignage de Mike, dans la discussion que j’ai eu avec lui, j’avais mentionné au préalable que moi-même j’avais certaines choses à améliorer concernant notamment l’utilisation du « Bumpboard » pour mesurer les poissons de mes clients. Je lui ai fait part que, peut-être je ne devrais pas le faire, mais que pour la photo, je trouvais ça plus facile pour mon client de prendre le musky directement sur le « board » plutôt que de le laisser essayer de le prendre dans le net. Voici ce que Mike avait à dire :
“So my theory in release is first
- If fish is perfect… don’t hold just let it go fish in water head first!
- If fish is stressed a bit or was hooked badly I rethink bumb board measuring process and photo process and try to convince clients that a photo isn’t necessary unless it’s a trophy or personal best and then do the proper release holding fish head into wind or current.
- I just try as hard as I can always for safety of the fish and angler! Catch and release works. We caught 2 fish yesterday with 2012 and 2014 tags.
Also…. Like you I’m a big fan of no back and forth. That’s old school and does more bad then good. ”
Comme vous le voyez, autant du point de vue de Sean que de Mike, c’est le temps d’exposition en dehors de l’eau qui est le facteur numéro un à considérer. Pour ce qui est du mouvement de va et vient lors de la remise à l’eau, Sean semble moins catégorique à ce sujet. Il ne dit pas que c’est dommageable ou que ça ne l’est pas, mais dit que c’est quand même à considérer. Du côté de Mike, il partage mon point de vue comme quoi ça fait plus de tort que de bien.
Question de vous mettre ça au sens figuré, je dis souvent à mes clients qu’un maskinongé c’est comme un « sprinter ». Il donne tout ce qu’il a sur l’attaque et après il est essoufflé. Quand on sort notre maskinongé de l’eau, c’est comme si vous, vous faisiez un sprint et qu’à la fin quelqu’un vous tenait la tête dans l’eau vous empêchant de reprendre votre souffle. C’est ce que l’on fait subir à un maskinongé quand on garde un musky en dehors de l’eau. Ayez ça à l’esprit et pensez-y.
En résumé, tout ce que vous pouvez faire pour réduire le temps d’exposition de votre poisson en dehors de l’eau, faites-le. La survie de votre musky en dépend ainsi que l’avenir de cette pêche. Lors du « release », pas de va et vient et de grâce, arrêtez de flatter votre musky, c’est pas un chat !